Les marais salants de Guérande et du Mès ou comment faire rimer patrimoine culturel avec patrimoine naturel

Objectifs :

Le savoir-faire des paludiers et, par voie de conséquence, les exploitations salicoles de la Presqu'ile de Guérande viennent d’être reconnus comme patrimoine culturel immatériel de la France par le ministère de la Culture. L'Agglo a été coordinateur du projet LIFE Sallina 2018-2024, qui visait à restaurer la biodiversité des marais salants et salés de la région Pays de la Loire. En parallèle, d'importants travaux sur des sites non exploités par la saliculture couvrant 170 ha, l'Agglo ambitionnait dans le cadre de ce LIFE de restaurer et/ou créer 20 ilots de nidification au sein de vasières exploitées des bassins de Guérande et du Mès.

Cette action visait à augmenter les effectifs nicheurs d'avocette élégante dans un contexte de réduction de sites occupés, mais surtout à augmenter la production de jeunes à l'envol dans un contexte de prédation terrestre extrêmement élevée au sein des salines exploitées, afin de favoriser l'état de conservation local de l'espèce. Si ces actions de création d’ilots ont été largement éprouvées sur des sites protégés dans d’autres secteurs géographiques, comme dans le cadre du LIFE Envoll sur le pourtour méditerranéen, cette action constitue la plus importante création de sites de nidification de laro-limicoles au sein d’exploitations salicoles menée en France.
 

Mesures mises en œuvre :

Grâce à un important travail d’animation auprès des paludiers, l’Agglo a signé près de 20 conventions pour créer ou restaurer des ilots au sein de vasières exploitées (bassins de stockage). Cette action a été délicate à négocier avec les paludiers car la création d'ilot peut être perçue comme limitant la production, en influant sur la capacité de stockage des vasières et en favorisant l'accueil de la serne pierregarin, espèce avec laquelle la cohabitation quotidienne peut être difficile pour les exploitants (attaques permanentes du paludier par les adultes pour protéger leur nid). Ces ilots ont été façonnés à partir de bermes, buttes issues du stockage de l'argile excédentaire dans les bassins lors de leur réfection par les paludiers. Le travail a été réalisé à l’aide de pelleteuses de type marais, avec des plaques permettant de circuler au fond des bassins sans les abimer, condition sine qua non pour intervenir au sein des exploitations. Les ilots ont été positionnés à distance des talus afin de limiter leur accès aux prédateurs terrestres. Le niveau des ilots a été défini avec chacun des paludiers pour éviter la submersion des nids lors du remplissage des vasières aux grandes marées, mais également pour éviter des niveaux topographiques trop hauts qui conduiraient à une colonisation rapide par la végétation. Outre ses résultats extrêmement favorables à la biodiversité, elle aura permis de mobiliser la profession sur des actions concrètes en faveur de la biodiversité, chaque paludier concerné par les travaux étant très impliqué dans le suivi de « ses » ilots. En parallèle, en tant que structure porteuse du Projet Agro-Environnemental et Climatique des sites Natura 2000 des Bassins de Guérande et du Mès, l’Agglo a fait évoluer le cahier des charges de la Mesure Agro-Environnementale (MAE) « Gestion des marais salants en faveur de la biodiversité » pour prévoir des heures d’entretien annuel des ilots par les paludiers engagés dans la MAE.  
 

Résultats / impact pour la biodiversité :

23 ilots ont été créés au sein d'une vingtaine d'exploitations salicoles, permettant l'installation de plusieurs colonies mixtes d'avocette élégante, sterne pierregarin, mouette rieuse ainsi que plusieurs centaines de couples de mouette mélanocéphale, espèce qui ne nichait pas sur les marais salants avant l'opération. Les effectifs nicheurs d'avocette élégante, évalués à 459 couples en 2019, ont atteint 1 154 couples en 2023, soit une augmentation de 250 % en 5 ans. La productivité de jeunes avocettes élégantes à l'envol est quant à elle passée de moyenne (0,2 à 0,3 j/cp) en 2019 à très bonne (supérieure à 0,375 j/cp) en 2023.
 

Crédit photo : Philippe Della Valle